Ce texte est traduit avec la permission du Pr Peter Malliaras, PhD.
Le lien de l’article original est disponible ici.
Il y a encore beaucoup d’inconnu sur les tendinopathies, et pourtant il y a des preuves scientifiques indiscutables que tous les cliniciens et tous les patients doivent connaitre. (Celles-ci sont disponibles dans les références à la fin du blog)
1. Le repos n’est pas bénéfique à la guérison de la tendinopathie.
La douleur peut se calmer, mais la reprise de l’activité est souvent douloureuse. Le fait de se reposer ne permet pas au tendon d’améliorer sa tolérance à la contrainte mécanique.
2. La tendinopathie n’est pas considérée comme une réaction inflammatoire classique même si il y a quelques cellules et molécules biochimiques inflammatoires impliquées.
Les anti-inflammatoires peuvent vous aider en cas de douleur très importante, mais leur effet n’est pas prouvé sur les cellules impliquées dans le processus pathologique.
3. Plusieurs facteurs de risque sont favorables à l’apparition d’une tendinopathie.
Le facteur principal est la sur-utilisation du tendon, ou simplement l’excès de certaines activités , incluant :
Certaines personnes sont plus exposées aux douleurs tendineuses à cause de facteurs prédisposants : biomécaniques (ex : faible capacité ou faible endurance musculaire, etc.), ou systémiques (ex : âge, ménopause, hypercholestérolémie, sensibilisation centrale etc.). Ces personnes peuvent déclencher une douleur au moindre changement d’activité.
4. La recherche montre que le traitement le plus efficace de la tendinopathie reste l’exercice.
Les tendons ont besoin d’être mis en charge progressivement afin d’améliorer leur tolérance aux contraintes mécaniques de la vie quotidienne.
Sans ce stimulus vital de remise en charge, il est très peu probable que la tendinopathie s’améliore.
5. Afin de diminuer la douleur tendineuse, il est important de modifier la mise en charge.
Il faut souvent, ou au moins temporairement, diminuer les contraintes qui demandent de l’emmagazinement d’énergie et de la compression.
6.La douleur n’est PAS synonyme de dommages tissulaires constatés à l’imagerie.
Les dommages tissulaires sont fréquents chez des individus asymptomatiques. Ce n’est pas parce que l’on vous a diagnostiqué une « pathologie tissulaire sévère » à l’imagerie, ou même une « déchirure », que votre pronostic de guérison est moins bon.
D’autant plus que l’on sait aujourdhui que même avec les meilleures intentions du monde et les traitements les plus sophistiqués (exercices, infiltrations, etc.), la plupart du temps le tissu pathologique ne se modifie pas. Donc même si l’étude de l’aspect tissulaire est nécessaire, la majorité des traitements ne se focalisent pas sur la réparation tissulaire, mais sur l’amélioration de la douleur et de la fonction.
7. Les traitements passifs seuls effectués sur le long terme n’améliorent que très rarement les tendinopathies : le massage, les ultrasons, les infiltrations, les ondes de choc, etc…
L’exercice est souvent l’ingrédient essentiel là où les traitements passifs ne sont que les additifs. Il faut éviter les infiltrations multiples car elles ont de moins bon résultats.
8. L’exercice doit être individualisé et adapté à la plainte douloureuse et fonctionnelle du patient.
La mise en charge doit être progressive et adaptée à la réponse douloureuse, afin d’atteindre les objectifs de restauration fonctionnelle.
9. Les tendinopathies répondent très lentement aux exercices.
Vous devez être patient, vous assurez d’effectuer correctement et progressivement l’exercice approprié, ne succomber pas à la tentation des « raccourcis » de traitements, comme les infiltrations ou la chirurgie. La plupart du temps il n’y a pas de raccourcis.
Les précédents points sont des principes généraux, et dans certaines situations, les adjuvants comme l’infiltration ou la chirurgie sont appropriés dans la prise en charge de la tendinopathie.
REFERENCES
Abate M, Gravare-Silbernagel K, Siljeholm C, et al.: Pathogenesis of tendinopathies: inflammation or degeneration? Arthritis Research and Therapy. 2009, 11:235.
Cook J, Purdam C: Is compressive load a factor in the development of tendinopathy? British Journal of Sports Medicine. 2012, 46:163-168.
Littlewood C, Malliaras P, Bateman M, et al.: The central nervous system–An additional consideration in ‘rotator cuff tendinopathy’and a potential basis for understanding response to loaded therapeutic exercise. Manual therapy. 2013.
Malliaras P, Barton CJ, Reeves ND, Langberg H: Achilles and Patellar Tendinopathy Loading Programmes. Sports Medicine. 2013:1-20.
Je suis ostéopathe, d’abord clinicien et puis mon parcours m’a amener a participer à des projets de recherche et d’enseignement.
A la sortie de mes études, remplies de dogmes thérapeutiques de la SEO (sainte église ostéopathique), je ne savais pas faire grand chose, et je ne comprenais pas pourquoi mes traitements fonctionnaient ou pas. Cette approche ne convenait pas à ma démarche d’analyse critique. J’ai donc choisi de suivre un parcours plus universitaire et je me suis plongé dans l’Evidence Base Medecine en participant à des publications d’articles scientifiques et en travaillant sur des projets de recherches (toujours en cours). Et je me suis rendu compte que comme dans le monde de l’ostéopathie, la médecine était aussi pleines de fausses croyances, et que leur modèle biomédical de la prise en charge de la douleur ne convenait pas vraiment.
C’est dans les neurosciences que j’ai pu enfin trouvé la voie du milieu entre tradition et sciences biomédicales.
Je me suis donc intéressé aux mécanismes neurophysiologiques de la douleur et grâce au courant Australien très en pointe (Robert Elvey, Lorimer Moseley, David Butler, Peter O’sullivan…) j’ai trouvé un intérêt particulier à prendre en charge la douleur sur le modèle bio-psycho-social, en portant un intérêt particulier aux douleurs du nerf (neuropathique). Dans le suivi des travaux d’Elvey, c’est en 2007 que j’ai eu la chance de rencontrer et suivre un élève de Bob Elvey, Philip Moulaert que j’assiste maintenant.
Durant mes différentes formations à l’étranger je me suis rendu compte qu’il y a avait peu de français. Je me suis aussi rendu compte que la langue était un barrage à l’arrivée des découvertes révolutionnaires de ces 15 dernières années, qui sont en train de changer la thérapie manuelle. Je voulais partager cela avec les thérapeutes manuels qui sont intéressés par ces informations mais qui n’ont pas le temps ou la compétence pour s’informer sur le sujet.
Les post sur ce blog auront donc deux buts :
• apporter des informations à jour sur la douleur et la thérapie manuelle,
• susciter l’analyse critique de notre pratique au vu des meilleurs niveaux de preuves disponibles